Retour sur la Journée annuelle des Eglises Vertes des Yvelines
Samedi 27 avril 2024, près de 75 personnes de 25 paroisses et communautés catholiques ou protestantes labellisées Eglise Verte se sont rassemblés pour une journée d’approfondissement spirituel et de partage au Centre Ozanam à Versailles. Après une intervention du Père Gaël Giraud, jésuite, sur le bien commun, ils ont questionné les pratiques de vie courante comme l’usage plus raisonné de l’argent ou une consommation alternative. Passant de la théorie à la pratique, les membres des équipes ont tiré les leçons de 4 années d’existence dans notre diocèse.
Harmonie, synergie pour une bonne gestion des biens
Un premier apport spirituel a été donné par le Père Gaël GIRAUD, jésuite, docteur en mathématique et en théologie, directeur de recherches au CNRS. Pour lui, à côté des biens publics et privés très étudiés par les économistes, il existe deux autres types de biens, les biens tribaux et les biens communs. Les biens tribaux reposent sur des règles pour la tribu, valables encore via la tradition (comme par exemple, les castes en Inde) ou selon l’appartenance à une structure (les réseaux sociaux) ; le sens est imposé alors par la position vis-à-vis de la tribu (amis ou ennemis). Les biens communs sont des ressources fragiles intéressant une communauté et supposant des règles de gestion acceptées par tous, comme l’eau potable.
Aujourd’hui, on constate que la communauté internationale n’a plus les ressources spirituelles pour affronter les grands problèmes, comme la santé, le climat, les fonds marins sans propriétaire.
Dans les Actes des Apôtres, qui relatent la création des premières communautés, l’affirmation « ils mettaient tout en commun » est souvent reprise. Dieu foudroie deux types de comportement, liés à des personnages : Ananias et Saphira, (qui conservent une partie de leurs biens tout en annonçant tout donner) et Hérode qui se prend pour Dieu. Il s’agit, en nos termes actuels, de dénoncer la re-privatisation de biens dits publics ou bien les régimes totalitaires et illibéraux. Quels sont les biens communs dont il faut prendre soin ? Comment inventer un régime où la société civile peut faire attention à ses biens communs ?
Dans l’Eglise, nous sommes souvent devant des textes multiples qui nous poussent à discerner pour interpréter : 2 récits de la création, 4 évangiles pour la vie de Jésus, par exemple. L’objectif est de nous mettre en travail spirituel et de nous donner des règles souples pour être ouverts à l’interprétation. Prenant appui sur les variations en musique, Gaël Giraud montre que, chez JS Bach, on a des variations sur la mélodie, qui conserve le fond harmonique. Ne sommes-nous pas aussi porteurs d’un même fond harmonique (l’Esprit-Saint), tout en inventant la mélodie de nos relations avec les autres ?
Répondant aux nombreuses questions, Gaël Giraud précise qu’un des enjeux actuels est de construire une communauté internationale pour tous, au-delà des intérêts du Nord qui présidaient en 1945 quand ont été écrits les textes régissant les échanges. Prenant l’exemple de la santé, il évoque la production de thérapies pour des maladies rares, faisant suite à la réunion d’acteurs qui auraient pu être concurrents, mais agissent en synergie. La même chose pourrait être envisagée pour l’alimentation. Interrogé sur les conventions citoyennes, il donne l’exemple positif de la délibération dans la convention climatique où chacun a pu écouter le désir de l’autre. Cela a eu pour effet d’interrompre le « radio-moi » !
Focus sur le poids des banques dans le changement climatique
Edouard VILPOUX, de Lutte et Contemplation, a souligné que nous continuons à financer des projets déjà lancés d’extraction d’énergie fossile, dont la mise en œuvre sera fortement émettrice de CO2. Quatre banques françaises parmi les plus importantes contribuent à ce type de financement : 137 Mds dollars dans ces secteurs. Désinvestir, c’est par exemple, choisir de ne plus apporter d’argent à des banques qui financent l’énergie fossile. Des Eglises s’y sont engagés, comme le diocèse de Grenoble et de nombreuses communautés. La parole publique des chrétiens a son importance.
Pour les catholiques, Laudato Si insiste sur les conséquences de notre foi sur le réel, en s’appuyant sur l’équité et la morale. Laurent CHEREAU, de la SIDI, a présenté l’épargne solidaire, touchant le social et l’écologique : financement d’un tissu économique local pour les exclus (microfinance, organisations paysannes…) et accompagnement de projets. Si l’on veut changer de banques pour en choisir une plus respectueuse de ce type de choix, il faut savoir que la « nouvelle » banque s’occupe de tout (prélèvements divers notamment).
Comprendre la consommation alternative
Un maraîcher bio nous a présenté les Amap (association pour le maintien d’une agriculture paysanne) qui regroupent des adhérents acheteurs de paniers sur l’année et un ou plusieurs producteurs. Un contrat solidaire entre ces parties (acheter l’intégralité de la récolte) préfinance ainsi les investissements et l’embauche notamment et exprime une solidarité en cas d’échec. L’Amap développe un lien social fort entre les parties et garantit aux producteurs un revenu, ce qui leur permet d’investir.
Autre exemple : les épiceries solidaires (EPI) où les adhérents discutent des produits essentiels à proposer, donnent au moins 2 heures de présence mensuelles pour tenir la boutique, s’occuper du réassortiment des produits retenus. L’EPI fait appel à des petits producteurs locaux, mais aussi à des producteurs éloignés pour certains produits (commerce équitable). Les prix sont 15 à 30 % moins chers, car l’EPI est un circuit court, mais les personnes en précarité n’y viennent pas encore ; il y aurait un projet de Sécurité sociale alimentaire à travailler.
Revue des actions Eglise Verte dans les Yvelines
Pour conclure, nous avons fait le point sur nos actions Eglise Verte depuis 4 ans. Christine a souligné nos avancées progressives, tant en direction des autres services paroissiaux qu’avec la société civile de nos territoires. Sans gommer notre spécificité de croyants, nous adaptons notre vocabulaire à nos interlocuteurs, utilisons des outils pour tous, comme la fresque du climat, tentons de remédier à la méconnaissance des textes du pape François (Laudato Si, Fratelli Tutti, Laudate Deum). Dans quelques paroisses, nous intégrons les plus pauvres dans nos actions, puisque clameur des pauvres et clameurs de la Terre ne font qu’un. En quelques années, nous avons vu apparaître l’éco-anxiété, qui touche beaucoup de nos contemporains.
Nous avons achevé cette réflexion en faisant ressortir en petits groupes puis en partageant avec tous les points forts de notre démarche dans nos différentes paroisses et communautés.
Alain Havet et Christine Bouvet de Gouttes pour la Pépinière Laudato Si
Pour en savoir plus, s’engager dans la démarche et trouver des idées d’actions concrètes : consultez la page de la Pépinière Laudato Si’