Les différentes manières de servir d’un diacre – témoignage
Patrick Claudet, diacre depuis 2014 dans le groupement paroissial de Houilles-Carrières est aussi en mission pour le Secours catholique à Sartrouville. Il évoque ses différentes expériences de service en partant des dialogues qui s’instaurent, de la relation de confiance et d’amour.
Equipe fraternelle
Marylise me présente à Pascale :
_ voici Patrick notre diacre.
_ C’est quoi un diacre ?
_ Quelqu’un qui est avec nous, qui nous accompagne.
Voilà une définition simple qui me va bien.
=> Pour être au service, il faut être avec, pas au-dessus, en-dessous à droite ou à gauche, vivre avec, partager des moments de vie des personnes à qui nous sommes envoyés.
Pause-repas à Ste-Pauline au Vésinet
Je suis interpellé : “Patrick, pourquoi fais-tu tout ça pour nous ?” Je réponds trop vite : “parce que c’est ma mission.”
Le visage se ferme : “Ah bo simplement car c’est ta mission.” Je crois me reprendre : “non, non, c’est parce que en vous servant je crois que je sers le Christ.” Le scud m’arrive en pleine face : “Nous ne sommes pas assez important pour toi, tu n’es pas avec nous simplement parce que tu nous aimes.” Marcel vient à mon secours : “Tu vois bien qu’il est heureux avec nous, arrête de l’embêter.”
=> Quand ce sont les personnes servies qui nous révèlent la raison d’être de notre engagement. Impossible d’être au service si çà ne nous rend pas heureux.
Maraude
Nous rencontrons Stéphane pour la première fois. Nous engageons la conversation. Il a faim nous dit-il. Mon binôme se précipite lui acheter un sandwich. Quand il revient, Stéphane range le sandwich dans son sac à dos et nous explique qu’il le donnera plus tard à des copains. Lui n’a plus de dents, ne peut mâcher, il lui faut une soupe, un yaourt.
=> Servir, c’est déjà se mettre à l’écoute, comprendre les besoins des amis rencontrés, ça peut prendre du temps.
Accueil des migrants
J’accompagne Khan à la préfecture. Pas de chance, il présente un passeport afghan alors que nous avons préparé le dossier avec un passeport pakistanais. C’est vrai que dans les montagnes, la ligne de la frontière est floue. Mais l’employé de la préfecture n’a pas la même appréciation et le dossier est refoulé. Au retour, Khan se jette sous le RER en gare du Vésinet. L’agir est nécessaire mais n’est pas suffisant.
=> Servir, ce n’est pas que remplir des papiers, c’est aussi dialoguer, s’engager dans une relation de confiance pour entretenir l’espérance malgré les coups durs. Je l’ai appris au détriment de Khan. Maintenant, même si un dossier me semble voué à l’échec, je prends le temps de l’échange pour nouer des liens qui permettront d’entretenir l’espérance.
Pause repas à Ste-Pauline du Vésinet
Nous n’avons pas vu Raymond depuis plusieurs semaines. Nous interrogeons ses amis. Il serait sous une tente dans la plaine de Montesson et ne pourrait plus marcher. Nous convainquons un de ses amis de nous conduire jusqu’à sa tente. Il est bien à l’intérieur, nous laisse examiner son pied. La couleur, l’odeur nous laissent suspecter la gangrène. Mais, il refuse obstinément que nous appelions les pompiers. J’appelle un formateur d’aux captifs la libération, lui explique la situation. Sa position est claire : en cas de danger vital, il faut appeler les secours même si la personne secourue s’y oppose. Le médecin du SAMU nous confirmera que grâce à notre appel, sa jambe va pouvoir être sauvée.
=> Servir c’est aussi être présent aux absents, s’inquiéter pour les absents, prendre soin le plus rarement possible contre la volonté des personnes rencontrées, s’affranchir des règles établies quand la vie ou l’intégrité physique est en jeu.
De belles rencontres
Servir, ce sont avant tout de belles rencontres où dans les échanges nous recevons souvent plus que ce que nous donnons. Ce sont parfois des galères, des épreuves. Mais, nous pouvons compter sur celui qui nous dit : « je vous ai choisi pour servir en ma présence ». Lui est le premier avec nous.
Le soir avant complies , je peux le remercier pour les belles rencontres vécues ensemble, lui demander pardon pour les erreurs faites par manque de son écoute, le prier d’être encore à mes côtés le lendemain. Merci Seigneur !
Témoignage livré lors de la rencontre annuelle
de la Fraternité diaconale diocésaine du 1er octobre 2022