Saint Thomas More, la fidélité à l’Eglise au prix de la tête
Mettant sa fidélité au catholicisme devant celle qu’il devait au pouvoir, Saint Thomas More a suivi la loi de sa conscience. En 2000, le pape Jean-Paul II l’a déclaré saint patron des hommes politiques.
Qui était Thomas More ?
Né en 1478, Thomas More fait ses études à l’université d’Oxford. Féru de droit et de théologie, il passera aussi quatre années chez les chartreux avant de devenir avocat. En 1504, il commence une brillante carrière politique en devenant membre du Parlement. Il y montre déjà son intransigeance en s’opposant au roi Henri VII sur des questions fiscales. Cela lui valu une retraite forcée au cours de laquelle il rédigea plusieurs ouvrage en vers ou en prose, considérés par ses contemporains comme des chefs d’œuvre d’élégance.
Rappelant Thomas More aux affaires, le roi Henri VIII l’envoie en ambassade à Bruges, où il rédige « Utopia », un traité satirique pour un monde meilleur. Devenu ensuite chancelier de l’Échiquier et familier du Roi, il prend sa défense contre les attaques de Luther. Cela ne l’empêche pas d’être réaliste et de déclarer que sa tête pourrait être sacrifiée pour une broutille.
Le soutien du catholicisme au prix de sa tête
Pourtant, c’est pour bien plus que cela qu’il fut décapité.
En dépit d’une dispense accordée par le Pape Jules II, le roi Henri VIII éprouvait de longue date des doutes sur la validité de son mariage avec Catherine d’Aragon, veuve de son frère. Sans descendance mâle et fort épris d’Anne Boleyn, demoiselle d’honneur de son épouse, le roi entrepris de faire reconnaître la nullité de son premier mariage. Après six années de vaines démarches auprès du Pape Clément VII, précédant un refus définitif, il fit prononcer l’annulation par l’Archevêque de Canterbury. Le Pape réagit en excommuniant le roi.
Très apprécié du roi qui louait sa sagesse, son intégrité et sa pureté*, Thomas More est, entre temps, devenu Chancelier du Royaume. Consulté sur la question du divorce du roi à l’origine du schisme avec l’Eglise et la création de l’Eglise anglicane, il s’est longtemps efforcé de ne pas donner son avis, avant de démissionner.
Refusant de prêter serment à l’acte de succession, qui dénie la compétence du Pape au profit du Parlement, le roi le fait emprisonner à la Tour de Londres. Thomas More y rédige une lettre d’explication où il dit que dans son refus de signer, il se sent appuyé par le « conseil général de la chrétienté ».
Pendant sa détention, Thomas More n’a pas cédé aux nombreuses pressions exercées sur lui pour qu’il renie sa conscience. Au contraire, il écrivait à ses proches en invoquant le Seigneur pour qu’il le garde « toujours sincère, simple et fidèle ».
Le 1er juin 1535, Thomas More est conduit au jugement. Il y plaide « qu’il est du devoir de chacun, sous peine d’être mauvais chrétien, d’obéir d’abord à Dieu, puis aux hommes ; d’être plus soigneux de ne pas offenser sa conscience que de toute autre chose au monde. » Il est cependant déclaré coupable de trahison et condamné à mort.
Les notes qu’il a livrées avant son exécution témoignent de son indissoluble attachement à la foi catholique : « Qui voudrait sauver sa vie pour déplaire à son Dieu ? – Si tu sauvais ainsi ta vie, combien tu te haïrais le lendemain ? » « Accorde-moi la grâce, ô mon Dieu, pour oublier le monde et penser à toi avec joie. » Peu avant le jour fatal, il rédige une longue prière où il demande au Seigneur de lui donner le désir d’être auprès de lui.
Saint Thomas More
Thomas More a été béatifié en 1886, et en 1935, le Pape Pie XI le canonise comme « athlète du Christ et glorieux martyr », en comparant sa mort à celle de Saint Jean-Baptiste.
Le 31 décembre 2000, le Pape Jean-Paul II l’a déclaré patron des responsables de gouvernement et des hommes politiques. Il soulignait à cette occasion « la dignité inaliénable de la conscience, dans laquelle, comme le rappelle le Concile Vatican II, réside ‘le centre le plus secret de l’homme et le sanctuaire où il est seul avec Dieu dont la voix se fait entendre dans ce lieu le plus intime’ (GS 16) ».
Il propose Saint Thomas More comme modèle parce qu’il « se distingua par sa constante fidélité à l’autorité et aux institutions légitimes, précisément parce qu’il entendait servir en elles non le pouvoir mais l’idéal suprême de la justice. Sa vie nous enseigne que le gouvernement est avant tout un exercice de vertus. »
Philippe de Pompignan
*Discours du Duc de Norfolk lors de la réception par Thomas More de la charge de Grand chancelier
Pour en savoir plus
– WALTER W. JOS., « Thomas Morus et son époque », Mame, Tours, 1848.
– Biographie de Thomas More sur « Nominis »
– JEAN-PAUL II, « Lettre apostolique en forme de motu proprio pour la proclamation de saint Thomas More comme patron des responsables de gouvernement et des hommes politiques », Vatican, 31 octobre 2000.