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Un après-midi à l’Etablissement pour mineurs de Porcheville


L’aumônier de l’Etablissement pour mineurs (EPM) de Porcheville témoigne de son accompagnement à travers la rencontre de deux jeunes.

Prise de contact dans la cour, aux barreaux

R. est arrivé à 13 ans et 1/2 pour « association de malfaiteurs en vue d’accomplir des actes terroristes » ; en bref, un “terro”, pour les autres détenus comme pour les surveillants. Le premier contact a eu lieu aux barreaux comme pour tous les autres jeunes : à l’EPM, toutes les fenêtres des cellules donnent sur la cour et comme il n’y a qu’un étage il est relativement facile d’échanger. Les jeunes nous interpellent aux barreaux car, en grande majorité, ils ont un besoin impérieux de parler.
– Vous êtes l’éducatrice du milieu ouvert ?
– Non, aumônière
– C’est quoi ? ….Vous croyez en Satan ? ….

R a donc accepté de me rencontrer non dans sa cellule mais dans un bureau. Nous avons eu plusieurs échanges sur des sujets divers, d’abord religieux puis sur la vie à l’EPM, son avenir, sa famille. J’ai la chance que ces entretiens soient réguliers.

Derrière le masque…

Aujourd’hui je le sens déconcentré, les yeux fuient vers la cour de promenade, tout son corps aussi  exprime ce malaise. Puis, brutalement, il lâche l’étiquette de “terro” comme un sac de ciment qu’on n’arrive plus à porter. Et il parle. Cela l’angoisse terriblement. R voit son avenir comme un trou noir, pas d’amis, pas de petite amie qui se sauvera dès qu’il parlera de son passé. D’ailleurs, il aimerait changer de prison, se retrouver avec des longues peines pour éviter la confrontation avec des nouveaux venus (à l’EPM, la moyenne de durée de détention est de 4 mois).
Comment réagir face à cette réalité ? Quel langage ou silence utiliser pour tenter de transmettre un brin d’espérance alors que moi aussi j’entrevois l’ampleur des difficultés ? Quelques secondes pour demander à l’Esprit de m’inspirer, physiquement et mentalement ! A la sortie du bureau je le sens un peu plus détendu, un peu plus seulement.

Psaume 142, paroles de liberté

Entretien suivant : W. Je le croisais depuis plusieurs semaines, un détenu m’avait dit qu’il était mal, presque suicidaire et je peux enfin prendre 1/2h avec lui dans sa cellule. Je le sens très demandeur, très à l’écoute. Il est juste baptisé mais n’a aucune culture. Je lui donne l’Evangile en BD. Puis je lui propose de lire un psaume dans le livret Paroles de liberté  : le psaume 142. Il s’exclame : « c’est exactement ce que je vis » !  A la fin de l’entretien je suis très touchée par ses mots : « je me sens bien, c’est bizarre je me sens vraiment bien ». Je lui laisse le livret avec une dédicace.

Ô grâce de l’Esprit….toujours présent, en toutes circonstances….pas de 35h ni de sélection.

 

Bénédicte Billard,
Issou le 15 janvier 2018