Amoris Laetitia : des clefs de lecture
Le père Jean-Marc Bot nous propose quelques traits saillants de l’exhortation “la joie de l’amour” du pape François. A lire.
Le pape François, avec son exhortation post-synodale intitulée « La joie de l’amour », renouvelle le discours de l’Église, en radicalisant, avec beaucoup de sagesse théorique et pratique, les orientations du concile Vatican II et de son exhortation « La joie de l’Evangile ». Il le fait sur la base d’un consensus général obtenu par les évêques participant à ce double parcours synodal. Ses fruits vont apparaitre, dans la durée, si les diocèses prennent la peine de mettre en œuvre l’effet de souffle qui s’en dégage. C’est bien l’intention de notre évêque et de ses conseillers. Parmi les points forts à souligner on peut en distinguer trois.
Partir de l’expérience spirituelle et l’encourager
Tout d’abord le regard du Christ sur le mariage et la famille nous pousse à développer partout, de plus en plus, une profonde expérience spirituelle. A la lumière de l’amour divin qui nous enveloppe et fait du couple une icône de la communion trinitaire, la vie conjugale reçoit toutes les énergies de la grâce pour avancer sur un chemin d’excellence. Ce pape aime bien, au sujet de la spiritualité conjugale, parler de mystique, dans une double direction : expérience intense de Dieu et d’appartenance à un peuple. Il nous donne de nombreuses indications pratiques pour un parcours de croissance et de maturation sans limite sous l’influence de la grâce.
Un langage nouveau
Pour transmettre cette doctrine il nous presse d’adopter un nouveau langage. Il paye d’exemple en cassant les codes d’une certaine langue de bois théologique et ecclésiastique. La Bible est présentée comme « une compagne de voyage » et non comme « une séquence de thèses abstraites ». Le langage de l’amour, au centre de la première annonce, est mis en valeur dans toutes ses dimensions, y compris esthétique et érotique, autant que sacrificielle, à tous les âges de la vie. Tout le discours de l’Eglise doit s’incarner dans une proximité compatissante, à la manière de Jésus, sans brader les exigences évangéliques les plus hautes. Il faut savoir donner « la saveur qui remplit et satisfait l’âme » (Saint Ignace de Loyola).
Une méthode pastorale exigeante et séduisante
Enfin il expose une véritable méthode pastorale, aussi exigeante que séduisante pour les acteurs de la mission au service des familles. Nous sommes incités à chercher de nouveaux chemins pour intégrer le plus possible de fidèles dans la vie ecclésiale et accompagner individuellement, ou en couple, ceux qui en ont besoin. L’objectif est surtout de discerner la volonté de Dieu dans les situations plus complexes, à la lumière de l’enseignement de l’Église, mais aussi des conditionnements qui limitent la marge de choix des personnes fragilisées. Au cœur de cette pédagogie s’inscrit le plus grand respect de la conscience morale, sans rigorisme ni laxisme (JA ch. 8). Au service de cette méthodologie le pape avait déjà proposé, dans « La joie de l’Evangile », un guide pour « l’accompagnement personnel des processus de croissance » (JE 169-173).
Nous avons là « un très grand texte », selon le cardinal Schönborn, pour inspirer une nouvelle étape de la pastorale familiale.
Jean-Marc Bot