Mesnil-le-Roi, Pentecôte, le tableau de Picot
La Pentecôte est un évènement fondateur, mais son effet se fait présence à travers le temps et l’espace. L’Esprit Saint accompagne l’Église depuis le premier jour, Il ne l’abandonne jamais. Il en est ainsi depuis ce premier matin, à Jérusalem.
Cette œuvre de Picot nous montre comment cet événement a été représenté dans une œuvre du XIXème siècle.
On peut voir dans l’église du Mesnil-le-Roi un très grand tableau représentant la venue de l’Esprit Saint sur les apôtres lors de la Pentecôte. L’auteur en est François-Edouard PICOT (1786-1868), peintre d’Histoire, plusieurs fois médaillé au Salon, membre de l’Institut, élève de David. Le tableau avait été commandé par Louis-Philippe en 1844 pour la chapelle de son château de Bizy, mais à cause de la Révolution de 1848, il ne fut jamais livré. Il demeura dans la famille du peintre et fut offert à l’église du Mesnil en 1877.
Le récit de la Pentecôte chrétienne se trouve dans les Actes des apôtres 2,1-13 : les apôtres sont réunis, « tout à coup survint du ciel un bruit comme celui d’un violent coup de vent : la maison où ils se tenaient en fut toute remplie ; alors leur apparurent comme des langues de feu qui se partageaient et il s’en posa sur chacun d’eux. Ils furent tous remplis d’Esprit Saint et se mirent à parler d’autres langues, comme l’Esprit leur donnait de s’exprimer ».
Dans ce récit, le vent et le feu symbolisent la présence de Dieu, ils sont une manifestation de la puissance divine ; les langues de feu symbolisent le don de l’Esprit fait à chacun des apôtres pour annoncer avec une langue de feu l’Evangile à tous les hommes.
Ce récit a inspiré aux artistes en Orient et en Occident de nombreuses représentations dans toutes les formes artistiques : icônes, toiles, bas-reliefs. Il est intéressant d’y observer :
- le mode de manifestation de l’Esprit Saint et de Celui qui l’envoie ;
- la composition du groupe de ceux qui reçoivent ;
- leurs attitudes : debout, assis, à genoux, mains jointes, en extase… ;
- le lieu de la réunion : porche, terrasse, salle fermée… ;
- l’articulation de ce lieu avec l’extérieur (parfois présence de la foule).
Lors du baptême de Jésus, la descente de l’Esprit est évoquée dans les évangiles synoptiques comme celle d’une colombe et l’iconographie chrétienne a largement retenu ce symbole pour signifier l’Esprit Saint. De la même façon, dans le récit de Pentecôte, les langues de feu descendues sur chacun des apôtres sont un des éléments le plus souvent représenté. Dans la peinture occidentale à partir du XIVe siècle, Marie est souvent au milieu des apôtres. Elle est présente au cœur de l’Église dont la Pentecôte est la naissance.
Ce qui frappe ici est la grande sobriété du tableau de Picot, son atmosphère sereine et recueillie, l’absence des langues de feu. Pas de vent, la présence divine se manifeste par une source de lumière qui irradie toute la scène ; elle est adoucie par un nuage, nul ne peut contempler Dieu. Pierre est debout, au centre, il est le chef de l’Église. A son côté, Marie se tient dans l’attitude de prière et d’accueil que l’on trouve dans les Annonciations, les yeux levés au ciel. A droite de Marie, Jean, imberbe – selon la tradition iconographique occidental – prie. Avec eux, les apôtres et quelques disciples sont représentés dans des attitudes différentes : certains se voilent la face, d’autres regardent vers la source de lumière. Tous sont saisis par le caractère exceptionnel de ce qu’ils vivent. Ils prient, debout ou à genoux.
La scène est située dans une église et non dans une maison privée ; le peintre a voulu souligner comment ce moment intense a été dans la foi et la prière le point de départ de la mission des apôtres, qui est l’annonce de l’Évangile à tous les peuples. C’est une manière de dire à ceux qui contemplent cette œuvre que la Pentecôte, événement fondateur hier, continue aujourd’hui son œuvre créatrice.
Suzanne Orain